La décarbonation de l’acte de construire, utopie ou réalité, ou en sommes-nous ?

En France, le secteur du bâtiment est à l’origine d’un quart des émissions de gaz à effet de serre, de la moitié de la consommation d’énergie, et de plus de 15 milliards d’euros d’importations annuelles de pétrole et de gaz. La décarbonation de l’acte de construire est donc un enjeu majeur pour répondre à la stratégie nationale bas carbone et faire face au défi climatique. Si les acteurs en sont conscients il reste du chemin à parcourir. Pour Eric Bergé chef de projet Plan de transformation au sein du Shift Project et issu du monde de la chimie de la construction tout ne pourra se faire par la technologie. Il est temps de réaliser des innovations de rupture en misant sur la sobriété ?

La filière ciment a pris du temps aux yeux de certains pour agir mais la dynamique est lancée. François Pétry, président du SFIC, Syndicat Français de l’industrie cimentière explique qu’une feuille de route a été rédigée en mai 2021. Objectif : une réduction de 24% des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 et la neutralité carbone à 2050.

La réglementation pousse les acteurs à agir. La RE2020 a été indéniablement un déclencheur estime Eric Bergé. Ce qui ne nie pas François Pétry.

Du côté de la construction la prise de conscience se fait à l’image de la démarche d’Eiffage Construction Vianney Fullhard directeur de la transition énergétique et du bas carbone précise que le groupe s’est inscrit dans la trajectoire des 1,5 degrés de hausse maximale des températures avec l’ambition de réduire de 46% l’empreinte carbone interne du groupe et externe de 30%.

« Il faut aller très vite mais aussi offrir des solutions à nos clients. On cherche les solutions sans dogme. On considére qu’il faut le bon matériau au bon endroit. »

Pour exemple la Tour Hypérion présentée comme la plus haute tour en bois mais qui en réalité mêle bois et metal béton.

Philippe Rizzotti architecte insiste sur la nécessité de trouver une solution médiane qui permette d’optimiser l’acte de construire en révisant les process car en France « on souffre d’une homogéneisation destinée à maximiser la rentabilité. »

Tous sont unanimes pour dire qu’il sera impossible d’avancer seul sur le sujet. A l’image du club industriel Sekoya créé en 2019 par Eiffage. Il s’agit d’une plateforme dédiée à la promotion des matériaux et procédés bas carbone composée d’acteurs du secteur privé et public  mais aussi de partenaires institutionnels académiques comme le CSTB. Ce club industriel français bas carbone vise à mettre en valeur les meilleures solutions au service de la ville et des infrastructures durables de demain.

Pour tous la décarbonation de l’acte de construction n’a rien d’une utopie. Elle est même déjà une réalité qui doit se traduire par une prise de conscience et un engagement fort dans sa stratégie d’entreprise. Eric Bergé est d’ailleurs très optimiste et voit une accélération des prises de décision qui ne pourra que porter toute la filière.

Une émission animée par Nathalie Croisé